Le titre peut sembler paradoxal : comment peut-on traiter une condition dite chronique ? Les données scientifiques montrent qu’il n’existe pas de traitement unique capable d’en éliminer complètement les manifestations, mais plusieurs approches permettent d’en atténuer les symptômes et d’en améliorer la gestion à long terme. On dispose plutôt d’un ensemble de stratégies permettant d’en atténuer les symptômes et d’en améliorer la gestion.

Pour alléger la lecture, le terme traitement sera utilisé ici pour désigner l’ensemble de ces interventions visant à soulager la douleur et à améliorer la qualité de vie. L’objectif de cet article est donc de présenter les principales approches thérapeutiques disponibles, leurs avantages et leurs limites.

Si vous n’avez pas encore lu le premier article de cette trilogie, nous vous invitons à le consulter : il explique les mécanismes neurophysiologiques de la douleur chronique, essentiels pour comprendre les principes évoqués ici.

À savoir : facteurs favorables

Même si chaque expérience de douleur chronique est unique, les données scientifiques révèlent certaines tendances générales. Les interventions les plus efficaces sont celles qui favorisent la participation active de la personne dans son processus de rétablissement. Passer d’un rôle passif — celui de « patient » recevant des soins — à un rôle actif, où l’on devient acteur de son mieux-être, constitue un facteur clé d’amélioration.

Les approches dites extrinsèques (médication, thérapies manuelles, hydrothérapie, etc.) procurent un soulagement temporaire, mais ne modifient pas les mécanismes de la douleur à long terme. À l’inverse, les interventions actives — telles que la thérapie cognitivo-comportementale, l’activité physique adaptée et l’éducation à la douleur — soutiennent une reprise d’autonomie et favorisent une meilleure adaptation.

L’éducation joue un rôle central : comprendre les mécanismes neurobiologiques et psychologiques de la douleur permet d’en réduire la charge émotionnelle et de mieux orienter ses actions. Enfin, les recherches montrent que les programmes multidisciplinaires, combinant plusieurs approches de façon intégrée et durable, offrent les meilleurs résultats sur la qualité de vie.

Traitements pharmacologiques

Il n’existe pas de pilule miracle contre la douleur chronique. Comme expliqué dans l’article Douleur chronique 101, celle-ci résulte d’interactions complexes entre des facteurs physiologiques, psychologiques et sociaux. Aucun médicament ne peut agir efficacement sur l’ensemble de ces dimensions.

Cependant, certains médicaments peuvent aider à contrôler des symptômes associés — tels que la douleur, les troubles du sommeil, les céphalées, l’anxiété ou les fluctuations de l’humeur — et ainsi améliorer la qualité de vie. Ces traitements sont souvent utilisés, par exemple, dans la fibromyalgie.

Les principales classes de médicaments comprennent :

  • Les antidépresseurs tricycliques sont prescrits à faible dose pour leurs effets sur la modulation de la douleur et l’amélioration du sommeil. Ils agissent en augmentant la disponibilité de certains neurotransmetteurs dans le système nerveux central. Leurs effets secondaires peuvent inclure la constipation, la sécheresse buccale, les étourdissements ou le brouillard cognitif.
  • Les gabapentinoïdes (ex. : gabapentine, prégabaline) réduisent l’hyperexcitabilité des voies nerveuses responsables de la douleur neuropathique. Ils peuvent toutefois causer de la somnolence, une prise de poids, un œdème périphérique ou des troubles de la concentration.
  • Les inhibiteurs sélectifs du recaptage de la sérotonine (ISRS), principalement utilisés pour réguler l’humeur, peuvent aussi atténuer la douleur en diminuant l’anxiété et la dépression associées. Ils sont parfois liés à des troubles digestifs, une diminution de l’appétit, de l’agitation ou des perturbations du sommeil.

Malgré leur utilité, ces traitements pharmacologiques n’offrent généralement qu’une réduction modérée des symptômes. Selon une méta-analyse publiée en 2021, l’amélioration de la douleur ou des capacités fonctionnelles varie de 5 à 20 %. Ces résultats soulignent l’importance d’intégrer la médication à un plan de prise en charge global où la personne demeure un acteur central du changement.

L’activité physique adaptée comme traitement

Parmi les approches actives, l’activité physique adaptée (APA) se démarque comme l’une des plus efficaces. Une revue systématique regroupant 381 études et plus de 37 000 participants vivant avec de la douleur chronique, dont la fibromyalgie, a montré que l’APA procurait les plus grands bénéfices sur les capacités fonctionnelles et le soulagement de la douleur — devant même la thérapie cognitivo-comportementale.

Les effets positifs de l’activité physique incluent une amélioration de la qualité du sommeil, les symptômes d’anxiété et de dépression, l’intensité de la douleur et la participation aux activités quotidiennes. Pour être efficace, l’activité physique doit être personnalisée selon les besoins, les capacités et les limitations de chacun. Chez les personnes atteintes de fibromyalgie, les activités cardiovasculaires (ex. : marche, vélo, natation) semblent les plus bénéfiques, suivies par l’entraînement en résistance, puis par les exercices d’étirement.

Le principe de progression est essentiel : les bienfaits se maintiennent et s’amplifient lorsque l’intensité ou le volume d’entraînement augmente graduellement. Une étude longitudinale de cinq ans a montré que les participants qui faisaient progresser leur programme voyaient une amélioration continue de leur condition, contrairement à ceux qui maintenaient un niveau constant d’effort.

L’efficacité de l’activité physique adaptée (APA) repose sur le fait qu’elle agit simultanément sur plusieurs dimensions du fonctionnement humain — physique, psychologique et sociale. C’est cette action globale qui explique en grande partie ses effets positifs sur la fibromyalgie et les autres conditions associées à la douleur chronique.

Sur le plan physiologique, l’activité physique stimule la production de neurotransmetteurs et d’hormones associées au bien-être, comme la dopamine et les endorphines. La dopamine active le circuit de la récompense et renforce le sentiment de satisfaction personnelle, tandis que les endorphines, sécrétées en réponse à un stress — bénéfique dans ce cas — contribuent à réduire la douleur, l’anxiété et la fatigue. Ces effets neurochimiques participent à la modulation des signaux douloureux et à une amélioration globale de l’état de bien-être.

Sur le plan psychologique, la pratique régulière de l’activité physique favorise le développement du sentiment d’auto-efficacité, soit la conviction d’avoir les compétences nécessaires pour influencer positivement sa condition. Ce sentiment constitue un moteur essentiel de motivation et de persévérance, en plus de diminuer la perception d’impuissance souvent associée à la douleur chronique.

Enfin, sur le plan social, l’activité physique offre des occasions de créer ou de renforcer des liens. Les activités pratiquées en groupe favorisent particulièrement la motivation et l’adhésion à long terme, bien que les préférences individuelles demeurent importantes. Retrouver la capacité de participer à des activités sociales — marcher entre amis, faire du vélo en couple ou jouer avec ses enfants — contribue également à une meilleure qualité de vie et à une réinsertion sociale durable.

L’activité physique : par où commencer

Chacun entretient une relation différente avec l’activité physique. Certaines personnes n’ont jamais été encouragées à en pratiquer, d’autres ont vécu des expériences négatives, et plusieurs ressentent une appréhension à l’idée de s’essouffler ou de ressentir de l’inconfort. Pourtant, la majorité de celles qui s’y initient découvrent rapidement les bienfaits physiques et psychologiques qu’elle procure.

Si vous ne savez pas par où commencer, un accompagnement personnalisé peut vous aider à identifier vos forces et vos limites, à choisir des activités adaptées à vos capacités et à vos objectifs, et à instaurer des habitudes durables. Un·e kinésiologue formé·e en activité physique adaptée peut vous guider dans cette démarche de façon sécuritaire et progressive.Lisez notre articles les stratégies d’organisation et de motivation pour intégrer et maintenir durablement l’activité physique au quotidien.