Une meilleure compréhension des mécanismes liés à la douleur permet aux personnes qui la vivent de mieux la gérer et même d’en réduire les symptômes

La douleur est un mécanisme de survie fondamental; elle nous aide à fuir ou à combattre ce qui est nocif pour notre organisme. À la base, la douleur est tout simplement un signal d’alarme. C’est un mécanisme de défense qui se traduit par une sensation désagréable en un point ou une région du corps. La douleur est ressentie lorsque les récepteurs nociceptifs, présents au niveau de la peau, des muscles et des articulations, envoient un message au cerveau pour indiquer qu’il y a un danger. Elle a donc pour but de protéger le corps lorsqu’une de ses parties est endommagée, ou risque de l’être, afin de minimiser les dégâts. C’est ce qui fait qu’on réagit en retirant rapidement sa main d’une surface chaude lorsque cela devient trop intense. Lorsqu’une lésion est produite, pour permettre la guérison, notre corps réagit en limitant les mouvements de la partie blessée. C’est ce qui se passe lors d’une entorse par exemple. En d’autres mots, la douleur est le complément psychique d’un réflexe protecteur. C’est un mécanisme de protection naturel et essentiel, mais qui peut parfois être perturbé et mener à de la douleur chronique. 

Les types de douleurs

Il est important de comprendre ce qu’est la douleur afin de mieux la gérer. Plus précisément, il existe deux types de douleurs: la douleur nociceptive ou douleur aiguë, qui dure généralement moins de trois mois, et la douleur chronique, qui persiste au-delà de trois à six mois. La douleur aiguë est assez simple à comprendre. Lorsqu’une lésion est produite, pour permettre la guérison, notre corps réagit en limitant les mouvements de la partie blessée. Par exemple, à la suite d’une entorse de la cheville, il est difficile de mettre du poids sur celle-ci pendant un certain temps, cela cause de la douleur, nous forçant à réduire ou éviter la mise en charge.

La douleur chronique est différente. Elle se divise en deux sous-catégories: la douleur neuropathique et la douleur nociplastique. La douleur neuropathique est un dommage ou une dysfonction d’une fibre nerveuse sensitive. Un accident vasculaire cérébral (AVC), une hernie discale, un syndrome du tunnel carpien et le diabète sont des exemples de conditions de santé qui peuvent causer de la douleur neuropathique. Dans ce type de douleur, il y a souvent un signe de lésion du niveau de la fibre nerveuse. Cependant, les sensations douloureuses sont souvent disproportionnées par rapport aux dommages réels, c’est-à-dire que les lésions sont d’une ampleur plus faible que la douleur qu’elles provoquent, qui, elle, peut être très grande.

La douleur nociplastique, elle, est causée par des changements sur le plan des structures et de la physiologie qui s’installent et qui modifient la réceptivité du système de la douleur. Elle n’est pas directement associée à une lésion. Elle s’explique plutôt par des changements physiologiques qu’une lésion passée a pu provoquer dans le système nerveux central. Cela entraîne un message douloureux alors que le corps n’est plus en danger. En d’autres mots, le système de détection de la douleur a été perturbé, ce qui altère la perception. Elle résulte donc des changements morphologiques du cerveau et c’est ce type de douleur qui caractérise par exemple la fibromyalgie. 

Attention, même lorsque le « système d’alarme » du corps humain est activé sans qu’il y ait de lésions apparentes ou que ces lésions semblent légères, la douleur, elle, est bien réelle et présente!

Un cerveau qui a peur de bouger

Le cerveau possède des mécanismes excitateurs et inhibiteurs qui favorisent ou réduisent la conduction de l’influx nerveux. Cet échange continuel entre l’excitation et l’inhibition des influx nerveux, lorsqu’il est en équilibre, permet de moduler des fonctions telles que la production de mouvement et la gestion de la douleur. Ainsi, si un geste pose un danger ou provoque des lésions, le cerveau reçoit l’information, génère une sensation de douleur et induit une réaction de protection. Le cerveau peut alors enregistrer le geste comme une mauvaise expérience. Avec le temps, ce même geste, même lorsqu’il ne pose pas de danger, peut finir par provoquer de la douleur ou une crainte de douleur en raison de cette mauvaise expérience enregistrée précédemment.

Un déséquilibre entre les mécanismes excitateurs et inhibiteurs peut mener à de la douleur chronique. En effet, dans ce cas, les mécanismes excitateurs qui envoient des messages de douleur au cerveau sont suractivés. Cela provoque un bombardement de messages de douleur des nocicepteurs vers le cerveau. Avec le temps, le seuil d’activation des mécanismes excitateurs est diminué; ils envoient leurs messages de douleur même s’il y a peu de stimulus, ce qui fait que la douleur est plus facilement enclenchée. Il peut même arriver que le simple fait de penser à un geste provoque une sensation de douleur. Les personnes qui vivent avec des douleurs chroniques deviennent très sensibles et, par conséquent, peuvent avoir tendance à moins bouger puisque le cerveau enregistre continuellement et anormalement de la douleur.

Une attention particulière doit être accordée aux facteurs psychologiques qui agissent sur la modulation de la douleur, la rendant plus ou moins intense. D’abord, les croyances et les attitudes personnelles concernant la douleur influencent l’intensité perçue. Il existe diverses stratégies pour contrer la douleur. Parmi celles-ci, on retrouve des méthodes passives comme la prise de médication, et  des méthodes actives comme l’exercice physique et la méditation. Ces dernières sont en général plus efficaces. En effet, les études rapportent que les personnes qui font appel à une méthode passive utilisent trois fois plus les services de soins de santé que les personnes utilisant une méthode active. Par ailleurs, l’attention portée à la douleur influence aussi l’intensité perçue et les émotions vécues, ce qui peut accentuer la douleur ressentie. Ainsi, pour apprendre à bien gérer la douleur, il faut être conscient des facteurs psychologiques qui peuvent l’influencer. Ceci permettra, entre autres, d’être davantage à l’écoute de son corps et, fort probablement, de diminuer l’intensité de la douleur ressentie. Ainsi, la pratique d’une activité physique est une solution apportant plusieurs bénéfices pour contrer certains des facteurs psychologiques inconscients qui peuvent augmenter l’intensité perçue de la douleur tout en permettant d’augmenter certaines hormones liées au bonheur comme la dopamine et d’être une méthode active vous permettant de bouger.

Effets de la douleur et moyens pour la diminuer

La douleur a un impact physique et un impact psychologique sur le corps humain. En effet, la douleur peut provoquer des tensions musculo-squelettiques, un ralentissement psychomoteur, une baisse d’énergie, de la fatigue et des problèmes de sommeil. Elle peut également créer du stress, des incertitudes, ainsi qu’une détresse psychologique, des questionnements et des inquiétudes, un sentiment d’impuissance, des craintes d’aggravation de la douleur et de l’hypervigilance. Cependant, il a été démontré qu’une meilleure compréhension des mécanismes liés à la douleur permet aux personnes qui la vivent de mieux la gérer et même de réduire leurs symptômes.

👉 Conseil de kinésiologue

Avant de pratiquer une activité physique, vous devriez évaluer votre douleur préexercice. Un peu comme l’échelle de perception de l’effort vue dans le premier article de cette série, l’échelle de perception de la douleur vous permettra de quantifier votre douleur sur une échelle de 0 à 10.

Source : https://www.groupeproxim.ca/fr/article/formulaires/formulaire-devaluation-de-la-douleur

Pendant l’activité physique, une augmentation de 1 ou de 2 points par rapport à l’évaluation préexercice est acceptable. Par contre, si la douleur s’amplifie rapidement ou augmente de 3 points ou plus pendant un exercice, il est recommandé de le modifier. 

Comment modifier un exercice?

  • Réduire l’amplitude du mouvement. Lors d’un squat, descendre moins bas. Lors d’une torsion du tronc, aller moins loin dans la rotation.
  • Ralentir le rythme. Continuer la marche, mais réduire la vitesse.
  • Réduire la durée. Au lieu de faire un exercice pendant 1 minute, le faire pendant 30 secondes.
  • Diminuer le nombre de répétitions. Au lieu de faire 10 pompes, en faire 5.

Vous pouvez aussi tenir un journal de bord dans lequel vous inscrivez l’heure, la date, la douleur ressentie et l’activité précédemment faite ou en cours. De cette façon, il sera possible d’identifier assez facilement quelle activité provoque de la douleur, ce qui vous permettra, par la suite, de l’adapter.

Finalement, la pratique de la méditation est une stratégie qui peut aussi aider à gérer la douleur. Cette méthode sera abordée dans une prochaine capsule. Ce type d’activité procure plusieurs effets bénéfiques, dont la réduction de la douleur chez les personnes vivant avec la fibromyalgie.

Si vous, ou un de vos proches, croyez avoir besoin d’un kinésiologue ou désirez discuter du sujet abordé dans cet article, contactez nous par téléphone ou via notre formulaire en ligne.

 

Bibliographie de l’article

Blyth, F. M., March, L. M., Nicholas, M. K., & Cousins, M. J. (2005). Self-management of chronic pain: a population-based study. Pain, 113(3), 285–292. https://doi.org/10.1016/j.pain.2004.12.004

Bushnell, M. C., Ceko, M., & Low, L. A. (2013). Cognitive and emotional control of pain and its disruption in chronic pain. Nature reviews. Neuroscience, 14(7), 502–511. https://doi.org/10.1038/nrn3516

Campbell, Y. & Gervais, S. (2020). Neurophysiologie de la douleur [Présentation PowerPoint]. Institut de kinésiologie du Québec. https://yvancampbell.files.wordpress.com/2020/08/01-niveau-1-2020-neurophysiologie-de-la-douleur.pdf

Darlow, B., Fullen, B. M., Dean, S., Hurley, D. A., Baxter, G. D., & Dowell, A. (2012). The association between health care professional attitudes and beliefs and the attitudes and beliefs, clinical management, and outcomes of patients with low back pain: a systematic review. European journal of pain, 16(1), 3–17. https://doi.org/10.1016/j.ejpain.2011.06.006

Langhorst, J., Klose, P., Dobos, G. J., Bernardy, K., & Häuser, W. (2013). Efficacy and safety of meditative movement therapies in fibromyalgia syndrome: a systematic review and meta-analysis of randomized controlled trials. Rheumatology international, 33(1), 193–207. https://doi.org/10.1007/s00296-012-2360-1

Lee, H., McAuley, J. H., Hübscher, M., Kamper, S. J., Traeger, A. C., & Moseley, G. L. (2016). Does changing pain-related knowledge reduce pain and improve function through changes in catastrophizing?. Pain, 157(4), 922–930. https://doi.org/10.1097/j.pain.0000000000000472

Commentaires





Add a comment